Une mise à jour essentielle pour le secteur : Comprendre les nouvelles exigences de la Charte de la langue française
Lors d’un webinaire tenu ce mercredi 11 décembre, animé par Véronyque Tremblay, directrice de l’Association Hôtellerie du Québec (AHQ) et présenté grâce à la contribution de l’Office québécois de la langue française (OQLF), les récentes modifications à la Loi sur la langue officielle et commune ont été explorées en profondeur.
Voici ce qu’il faut savoir pour rester en conformité et tirer parti de ces ajustements.
Changements apportés par la Loi sur la langue officielle et commune
La Loi sur la langue officielle et commune du Québec, adoptée le 1er juin 2022, a apporté des modifications importantes à la Charte de la langue française. Ces changements visent à renforcer la place du français dans les entreprises et les espaces publics. Voici les points clés à retenir :
Rédaction en français des documents essentiels
Toutes les offres d’emploi, formations destinées au personnel et communications internes doivent maintenant être rédigées en français.
Limitation des exigences linguistiques
Les employeurs doivent prendre les moyens raisonnables pour éviter d’exiger la connaissance d’une autre langue que le français, sauf si cela est justifié par la nature du poste. Si le français suffit pour accomplir les tâches, il ne peut être demandé à un candidat de maîtriser une autre langue, comme l’anglais.
Affichage commercial
D’ici le 1er juin 2025, les marques de commerce et noms d’entreprise affichés publiquement devront apparaître avec une nette prédominance du français. Bien que la majorité des établissements touristiques, comme les hôtels et gîtes, respectent déjà cette règle, certains devront apporter des ajustements pour s’y conformer.
Processus de francisation : ce que cela signifie pour vous
Pour les établissements de 25 à 49 employés, l’inscription auprès de l’Office québécois de la langue française (OQLF) est obligatoire avant le 1er juin 2025. Pour les entreprises comptant 50 employés ou plus, cette obligation est déjà en vigueur. Et pour les plus petites structures ? Même si vous avez moins de 10 employés, il est possible de suivre ce processus sur une base volontaire.
Voici les grandes étapes pour réussir votre transition linguistique :
1. Inscription à l’Office québécois de la langue française
L’inscription est une première étape simple et gratuite pour toutes les entreprises.
Rendez-vous sur le site de l’OQLF pour entamer votre inscription dès maintenant : Inscrivez votre entreprise ici.
2. Analyse de la situation linguistique
Dans les trois mois suivant votre inscription, l’OQLF effectue une analyse de la situation linguistique de votre entreprise. Si l’utilisation du français est jugée conforme, un certificat de francisation vous sera délivré. Ce certificat peut être affiché fièrement sur vos plateformes, soulignant votre engagement envers la langue française.
3. Programme de francisation
Si des lacunes sont identifiées, vous devrez élaborer un programme de francisation pour vous conformer. Celui-ci vise à corriger les aspects problématiques, en mettant en place des actions concrètes adaptées à votre réalité. C’est une étape particulièrement importante pour les entreprises avec une main-d’œuvre multiculturelle, où des ajustements linguistiques peuvent être nécessaires.
4. Certification et permanence de la francisation
Une fois les objectifs atteints, l’OQLF délivre une certification officielle de francisation. Il est essentiel de s’assurer que le français demeure généralisé à tous les niveaux, ce qui implique des efforts continus pour maintenir cette conformité.
5. Rapport sur l’évolution de l’utilisation du français
Pour conserver votre certification, un rapport doit être soumis à l’OQLF tous les trois ans. Ce suivi permet de vérifier que vos efforts portent fruit et que l’utilisation du français reste prioritaire.
Les sanctions : un rappel des conséquences
Le non-respect des obligations linguistiques prévues par la loi peut entraîner des sanctions significatives, une réalité qui prend encore plus de poids dans le contexte actuel. Lors du webinaire, Véronyque Tremblay, directrice de l’AHQ, a été catégorique : les plaintes liées à la Charte de la langue française sont en forte hausse depuis la modification de la loi. « Les consommateurs sont bien informés. Quand ils constatent qu’un service ou une communication n’est pas en français, ils n’hésitent pas à porter plainte, et cela se reflète dans les chiffres, » a-t-elle expliqué.
Un conseiller en accompagnement des entreprises, également présent lors du webinaire, a renchéri :
« Au cours des cinq dernières années, le nombre de plaintes a presque doublé. Et ce n’est pas qu’une question de chiffres : même en l’absence de plaintes formelles, il faut comprendre que des clients insatisfaits peuvent choisir de ne jamais revenir. Ce sont des pertes commerciales invisibles, mais bien réelles. »
Voici ce que vous risquez en cas de non-conformité :
Amendes administratives :
- Pour une personne physique : entre 700 $ et 7 000 $.
- Pour une personne morale (entreprise) : entre 3 000 $ et 20 000 $.
- Pour une première récidive, les montants minimaux et maximaux sont doublés.
- Pour des récidives additionnelles, les montants sont triplés.
Comité de francisation : obligations pour les grandes entreprises
Les entreprises employant 100 personnes ou plus doivent mettre en place un comité de francisation ayant pour objectif de contribuer à faire du français la langue normale et habituelle de travail.
Composition : Au moins six membres, comprenant la moitié de représentants du personnel, un interlocuteur principal avec l’OQLF et des membres désignés par la direction.
Responsabilités :
- Rédiger un rapport d’analyse de la situation linguistique et le rapport triennal.
- Élaborer et suivre un programme de francisation.
- Veiller au maintien de la conformité après l’obtention du certificat.
- Rédiger un procès-verbal pour chaque réunion et le transmettre à l’Office.
Affichage commercial : des ajustements clés pour 2025
Dès le 1er juin 2025, le français devra occuper une place prédominante sur tous les affichages commerciaux visibles de l’extérieur d’un local. Ce règlement impose une nette prédominance du français, et les entreprises doivent dès maintenant planifier leurs ajustements.
Qu’est-ce que la nette prédominance ?
La nette prédominance, c’est garantir que le français occupe une place visuellement dominante et évidente sur tous les affichages. Concrètement, cela signifie que :
- L’espace occupé par le texte en français doit être au moins deux fois plus grand que celui utilisé pour toute autre langue.
- La visibilité et la lisibilité du texte en français doivent être égales ou supérieures à celles des textes dans une autre langue. Cela inclut des éléments comme l’éclairage, la taille des caractères et leur emplacement.
Lors du webinaire, plusieurs exemples concrets ont été présentés pour illustrer les nouvelles exigences en matière d’affichage commercial :
- Exemple 1 : Une enseigne affichant « Boucherie » et « Best Beef » de taille identique ne sera plus conforme à partir du 1er juin 2025.
- Exemple 2 : Si « Boucherie » est écrit deux fois plus gros que « Best Beef », alors l’affichage est conforme.
- Exemple 3 : Une autre option acceptable serait d’ajouter une mention en français, comme « Saveur et fraîcheur », ou encore « Charcuterie traiteur ». Dans ces cas, la quantité de texte en français est nettement supérieure à celle en anglais, respectant ainsi la réglementation.
Passons à un autre cas :
- Exemple 4 : Une enseigne affichant « Good Tires » et « pneus à bas prix » avec des caractères de taille identique ne sera plus admissible après le 1er juin 2025.
- Exemple 5 : Si vous ajustez l’enseigne pour ajouter une mention comme « Grande sélection » en français, ou si la portion française devient visuellement dominante, l’affichage devient conforme.
Des exceptions prévues
La nette prédominance ne s’applique pas si l’affichage :
- Est situé à l’intérieur d’un local, non visible de l’extérieur.
- Se trouve sur un véhicule.
- Apparaît sur une borne ou une structure indépendante, comme une enseigne pylône, affichant plus de deux noms.
Outre l’affichage des marques de commerce et des noms d’entreprise, le règlement s’applique également à deux autres aspects importants :
- Les marques de commerce sur les produits. Si vous vendez des produits sur lesquels votre marque est inscrite, elle doit respecter les règles du français.
- Les contrats d’adhésion. Par exemple, lorsqu’un client devient membre privilégié d’une chaîne d’hôtel en signant un contrat, celui-ci doit impérativement être en français. Il n’est pas permis que ce type de contrat soit rédigé uniquement en anglais, une règle qui s’applique également à d’autres documents similaires.
Soutien et ressources
L’OQLF propose plusieurs outils pour accompagner les entreprises dans cette transition :
Programme Mémo, mon assistant à la francisation
Le Programme Mémo, mon assistant à la francisation est une initiative conçue pour accompagner les nouveaux arrivants dans leur apprentissage du français au Québec.
Accessible via une application mobile, Mémo propose des leçons interactives, des exercices pratiques et des outils de suivi personnalisés pour faciliter l’intégration linguistique et culturelle. Adapté aux besoins individuels, il couvre des situations courantes comme le travail, les services publics et la vie quotidienne.
Auto-évaluation en ligne
Cet outil numérique permet aux entreprises de mesurer rapidement et facilement leur niveau d’utilisation du français dans leurs communications, leurs services et leur gestion. En répondant à une série de questions ciblées, les employeurs obtiennent un diagnostic clair de leurs pratiques linguistiques et des pistes d’amélioration.
Faites votre auto-évaluation dès maintenant : oqlf.gouv.qc.ca/autoevaluation
En conclusion
Avec une clientèle plus consciente et des mécanismes renforcés pour signaler les écarts, les entreprises ont tout intérêt à prendre les devants. Une mise en conformité proactive avec les exigences de la Charte peut non seulement éviter des sanctions financières et des inspections de l’OQLF, mais aussi renforcer leur crédibilité et leur réputation auprès de la clientèle québécoise.
Pour rester conformes et profiter de cet accompagnement, inscrivez-vous rapidement auprès de l’OQLF et mettez en place les mesures nécessaires avant les délais impartis.
Pour en savoir plus ou entamer votre démarche, consultez le site officiel de l'OQLF : Inscription à l'Office québécois de la langue française