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Non, la vie professionnelle ne s’arrête pas à 50 ans

Maturité, expérience, mobilité… Les atouts des « seniors » sont bien plus nombreux que certains semblent le penser.

« Au secours, je viens d’avoir 50 ans ! » Si vous avez-vous-même plus de 50 ans, vous avez certainement entendu cette plainte, ou vous avez en tout cas secrètement pensé… à 50 ans, c’est le début de la fin. Oubliés les milliardaires américains comme Warren Buffet ou Carl Icahn, et même, sans aller chercher si loin, l’homme d’affaires et milliardaire Albert Frère ou Bernard Arnault, le P-DG de LVMH : désormais jugé incapable d’évoluer, hermétique aux nouvelles technologies, plus fatigable, trop coûteux, vous êtes forcément un poids pour l’entreprise, qui ferait bien de se débarrasser de vous au plus vite si elle veut croître et embellir.

Exagérée, cette vision de la situation ? Pas du tout. Sinon, comment expliquer le constat accablant dressé par l’INSEE dans son étude « Emploi et salaires » : « La France se distingue par un « décrochage » particulièrement marqué de la participation au marché du travail à partir de l’âge de 55 ans », peut-on y lire. Et c’est hélas un phénomène bien français : à l’échelle européenne, la France se place en queue du peloton avec un taux d’emploi des 55-64 ans de 39,7 % quand la moyenne de l’Union européenne est de 46,3%. En Allemagne et au Royaume-Uni, ce taux dépasse 57%, il atteint même 70,5% en Suède. Même l’Espagne (43,6%), le Portugal (49,2%) et la Grèce (42,3%) font mieux que nous, bien qu’ils soient eux aussi très en retard par rapport aux pays du Nord de l’Europe. Seule l’Italie, parmi les pays d’importance comparable, fait moins bien que la France (36,6%).

Difficile d’imaginer que les plus de 50 ans du sud de l’Europe soient amortis et bons à jeter alors que leurs homologues du nord sont encore fringants et dynamiques. L’espérance de vie à la naissance est d’ailleurs comparable dans tous les pays d’Europe, où elle dépasse désormais les 80 ans. Ce n’est donc pas dans la physiologie qu’il faut chercher la raison des différences.

Difficile, également, de penser que seuls les plus de 50 ans français soient subitement devenus stupides et bornés, quand ailleurs en Europe ils restent vifs et productifs. Et surtout, cela ne s’appliquerait qu’au monde de l’entreprise, puisque nos hommes politiques de premier plan, les meilleurs du monde – comme chacun sait, sont en moyenne 20 ans plus vieux que leurs homologues européens.

Une vision du travail dépassée

C’est donc bien dans les esprits, et non dans les faits, qu’il faut chercher des explications. En voici une, qui en vaut bien d’autres : cette idée délétère, assénée sans répit depuis des décennies par nos syndicats, qui veut que le travail soit fatigant, épuisant même, et qu’au-delà de 60 ans il ne soit plus supportable ni physiquement ni mentalement par les salariés. D’où la tendance des programmes de pré-retraite. Le résultat est là : avec l’aide coupable des politiques, l’âge moyen de sortie du marché du travail des Français est le plus bas en Europe : 58,8 ans selon le même rapport de l’INSEE, soit 6 ans avant les Suédois. Mais surtout, l’effet pervers de cette vision du travail est que, petit à petit, l’idée a fait son chemin que les seniors ne sont plus à même de travailler comme les plus jeunes. Selon le baromètre réalisé par le Défenseur des Droits et l’OIT (Organisation Internationale du Travail), l’âge est, avec le fait d’être une femme enceinte, le premier critère des discriminations ressenties par les salariés : être âgé de plus de 55 ans est considéré, par 81 % des salariés et 88 % des demandeurs d’emploi, comme un inconvénient pour être embauché.

Voyons plus en détail les reproches qui sont faits aux salariés les plus âgés. Interrogés à l’occasion du baromètre « L’accès à l’emploi et les seniors » du cabinet A Compétences Egales, entreprises, cabinets de recrutements et candidats seniors citent plusieurs freins perçus à l’embauche des seniors : « coût plus élevé pour l’employeur », « difficultés à être managés », « résistance élevée au changement », « sur-dimensionnement » par rapport au poste, « temps restant à travailler dans l’entreprise ». Ce sont bien évidemment des préjugés : lorsqu’ils sont interrogés directement, 80% des cadres seniors déclarent être prêts à revoir leur rémunération à la baisse, tandis qu’ils sont plus de 90% à déclarer être prêts à changer de fonction (lire aussi la chronique « Comment rester un manager employable après 50 ans ») . Quant au temps restant à travailler en entreprise, c’est, là aussi, un préjugé : un salarié de 50 ans a devant lui près de quinze années de vie professionnelle, et certainement une moindre envie d’aller voir ailleurs si l’herbe y est plus verte. Quelle entreprise peut dire aujourd’hui qu’elle a la garantie que ses cadres y resteront au moins quinze ans ? Contrairement aux a priori, le cadre senior est donc une garantie de fidélité pour l’employeur, une réponse au turn-over qui affecte certaines fonctions.

Des seniors à haut potentiel

Les deux témoignages suivants illustrent parfaitement le potentiel des plus de 50 ans.
Xavier, 52 ans, a dû quitter le laboratoire pharmaceutique dont il était devenu le DG à la suite d’une fusion douloureuse comprenant un plan social qu’il a dû gérer et dont il a fini par être lui-même victime. Marqué par cette expérience, il décide de réorienter sa carrière vers un poste plus en rapport avec sa formation (médecin) et où il aura moins de responsabilités managériales. Acceptant de réduire significativement son salaire, il retrouve rapidement un poste de directeur médical dans un autre laboratoire, plus petit, alléché par la possibilité de recruter un cadre de grande expérience à un salaire avantageux. Trois ans plus tard, Xavier est pleinement heureux dans ses nouvelles fonctions, toujours intéressantes mais beaucoup moins stressantes. Quant à son employeur, il a fait une très bonne affaire : jamais il n’aurait pu s’offrir un cadre dirigeant de son expérience et de sa valeur s’il n’avait été en recherche d’emploi.

Jean, 55 ans, était directeur général de la filiale française d’un groupe étranger. Victime d’une réorganisation globale, il a perdu son emploi, malgré des résultats excellents. Les différents chasseurs de tête consultés le découragent tous : à son âge, il est illusoire d’espérer retrouver un poste avec le même niveau de responsabilité et de rémunération. « C’est triste à dire, mais vous êtes trop vieux : aujourd’hui les postes de DG sont confiés à des cadres de moins de 40 ans, ayant une forte culture internationale. On ne peut rien pour vous. » Voilà le leitmotiv du moment. Il trouvera pourtant une entreprise plus petite, intéressée par son parcours et ses résultats, qui lui confiera la responsabilité d’une filiale à l’étranger. Cinq ans plus tard, tout le monde y a gagné : son employeur a vu avec satisfaction le chiffre d’affaires de la filiale doubler dans un contexte économique pourtant difficile, et Jean a maintenu son niveau de responsabilités et de rémunération dans un environnement plus stimulant qu’auparavant.

Ces deux exemples ne sont pas des exceptions : nous voyons fréquemment des cadres dirigeants de plus de 50 ans, prêts à se remettre en cause pour retrouver des responsabilités de haut niveau. Expatriation, changement de domaine d’activité, changement de culture d’entreprise, parfois même baisse de rémunération, ils sont bien plus ouverts qu’on pourrait le penser. Et les employeurs qui leur font confiance bénéficient pleinement de leur expérience et de leur maturité. Sans compter leur farouche envie de revanche, qui leur donne une volonté qui fait défaut à nombre de cadres plus jeunes, mais qui n’ont pas senti le vent du boulet.

Bizarrement, en France, personne (politique, sociologue ou économiste) ne fait de parallèle entre la santé économique des différents pays européens et le taux d’emploi des seniors, qui évoluent pourtant avec une symétrie troublante. Pour une fois, cessons de penser que nous, Français, détenons la vérité, et prenons les pays du Nord en modèle. Nous avons tout à y gagner, en particulier sur le plan économique.
 
Les 6 atouts des plus de 50 ans

1. Une garantie de fidélité à l’entreprise. A plus de 50 ans, on y regarde à trois fois avant de quitter son l’entreprise.

2. Une expérience professionnelle irremplaçable. C’est un fait incontournable : en 30 ans de carrière, surtout en cas de parcours diversifié, on a été confronté à plus de situations différentes qu’en cinq ou dix ans, on est donc plus à même d’affronter des problématiques très diverses, qu’elles soient stratégiques ou opérationnelles.

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