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· Workforce

Parler de santé mentale au travail… oui, mais comment?

Saviez-vous que la maladie mentale est la principale cause de l’absentéisme au travail? C’est donc un sujet qui devrait intéresser autant les employeurs que les employés eux-mêmes. Le plus dur dans tout ça? En parler!

 

Ce n’est pas toujours facile pour un employé d’aborder cette question délicate auprès de son employeur et vice-versa. Pourtant, il hésiterait beaucoup moins à lui dire qu’il s’est blessé à la jambe, par exemple, et que cela l’empêche de bien accomplir ses tâches. Par contre, lorsqu’il s’agit de santé mentale, il devient soudainement un peu plus frileux. Peur d’avoir l’air faible? De manquer de contrôle? De perdre son emploi? Peut-être toutes ces réponses.

 

À l’aide, ça ne va pas!

 

Les problèmes de santé mentale au travail peuvent être causés par divers facteurs: épuisement, manque de reconnaissance, tensions avec le patronat ou les collègues, n’en sont que quelques exemples. En hôtellerie, on peut penser aux demandes émotionnelles des clients et à certains commentaires désobligeants de leur part. «Ce n’est pas toujours une situation facile pour un employé lorsque ça fait quatre clients qui déversent toute leur frustration sur lui. Si ça se répète fréquemment, ça peut être problématique surtout s’il n’a pas de soutien de ton superviseur », illustre Julie Dextras-Gauthier, professeure adjointe au département de management de l’Université Laval.

 

Mais ce n’est pas tout. On peut aussi faire un épuisement professionnel en raison de tensions à la maison avec les enfants, d’un deuil ou d’une séparation. «Même si ce sont des facteurs hors travail, l’employeur doit s’en préoccuper», précise la professeure. «Dans le secteur de l’hôtellerie, [les employés travaillent] sur des shifts, avec un horaire parfois différent d’une semaine à l’autre. Il faudrait voir la possibilité de travailler une semaine de jour et l’autre de soir. Des horaires changeants et irréguliers peuvent causer des problèmes sur la conciliation travail-famille et des problèmes de santé mentale au travail», poursuit-elle.

 

Bon. Lorsqu’on sait que quelque chose ne va vraiment pas, c’est là qu’il faut se lancer et en parler à ses collègues et à son employeur. «La santé mentale au travail est un sujet qui est tabou en entreprise. Les gens ne sont pas nécessairement enclins à aller voir leur patron et à leur dire : « ça ne va vraiment pas bien, j’ai des problèmes dans ma vie privée qui m’empêchent de bien faire mon travail». Les gens ont cette crainte parce qu’ils pensent que ça peut affecter le développement de leur carrière », note Mme Dextras-Gauthier.

 

Conseils à l’employeur

 

Depuis une quinzaine d’années, on remarque qu’il y a de plus en plus de sensibilisation sur la santé mentale au travail et on en parle davantage dans les facultés d’administration et les programmes de gestion des ressources humaines. Il n’y a pas un secteur industriel qui est plus touché par les problèmes de santé mentale au travail, selon les observations de Julie Dextras-Gauthier : «ce sont plutôt les conditions de travail qui sont problématiques, soit la conception des tâches, les demandes au travail, le soutien social et les récompenses».

 

Et on ne peut se le cacher, l’absentéisme coûte beaucoup plus cher à l’employeur que la prévention des problèmes de santé mentale. Ce dernier a donc intérêt à s’informer fréquemment auprès de ses travailleurs à savoir s’il vont bien et si les tâches demandées leur conviennent. En bref, il doit se montrer ouvert et à l’écoute de leurs préoccupations.

 

La question de la reconnaissance et des récompenses est aussi importante. Une tape dans le dos, un simple merci pour le travail accompli peut faire toute la différence! L’employé doit se sentir récompensé pour le travail qu’il fait que ce soit monétairement ou sur le plan du développement de carrière. De plus, il doit aussi se sentir en sécurité et non sous la menace constante d’un licenciement en cas de faux pas.

 

Et les collègues dans tout ça?

 

Les collègues, eux, peuvent être d’une grande aide pour quelqu’un vivant une période difficile. Juste le fait d’être à l’écoute, d’organiser une activité sociale ou d’aider le collègue dans ses tâches peut être bénéfique!

 

Cependant, l’employé qui part en congé de maladie ne se fera pas nécessairement remplacer donc, les autres employés peuvent soudainement se retrouver avec plus de travail. «Parfois, ils vont se retrouver en « surtâche », et ça peut être difficile pour eux de trouver l’empathie qu’il faut envers l’employé qui est parti», note Mme Dextras-Gauther. Ce sera donc à l’employeur de rééquilibrer la charge de travail. La professeure insiste toutefois sur ceci: «un des facteurs de protection les plus importants lorsqu’on parle de santé mentale au travail c’est le soutien des collègues, qui aide beaucoup à passer au travers. »

 

En parler à l’entrevue?

 

Quelqu’un qui aurait vécu des problèmes de santé mentale devrait-il le mentionner à son futur employeur? Selon la Charte des droits et libertés de la personne, l’employeur n’a tout simplement pas le droit de poser des questions discriminatoires reliées à la santé lors de l’embauche, à moins qu’il démontre que ces renseignements réfèrent à des aptitudes ou des qualités requises par l’emploi. «Ce n’est pas parce que, par le passé, l’individu a eu des problèmes de santé mentale au travail, que ce soit de la détresse psychologique, de l’épuisement professionnel, des épisodes dépressifs, qu’il ne sera pas apte à faire le travail maintenant. Ce serait discriminatoire de porter un jugement là-dessus en tant qu’employeur», explique Julie Dextras-Gauthier. «En tant que futur candidat, il est toujours mieux de dire la vérité en entrevue. Il faut savoir qu’on n’est pas obligé de répondre à ces questions-là», conclue-t-elle.

 

 

Mieux vaut prévenir que guérir : quelques statistiques

 

·      Selon l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal (IUSMM), seulement 30% des gens faisant une dépression cherchent de l’aide, en partie en raison de la stigmatisation entourant toujours la maladie mentale et en partie parce qu’ils ignorent tout simplement qu’ils font une dépression.

 

·      Toujours selon l’IUSMM, les problèmes de santé mentale en milieu de travail coûtent aux entreprises canadiennes près de 14% de leurs profits annuels nets, soit jusqu’à 16 milliards de dollars annuellement.

 

·      Selon le Ministère de la Santé et services sociaux du Québec, près de 50% des absences en milieu de travail sont liées à la maladie mentale.

 

·      Selon l’Institut de la statistique du Québec, les femmes sont plus susceptibles de consulter un professionnel de la santé que les hommes (13% c. 6%).

 

 

 

 

Marie-Anne Dayé - Blogueuse Hotelleriejobs

«Marie-Anne Dayé est journaliste indépendante depuis près de deux ans. Lors d'un séjour en France, elle a écrit pour des médias tels que Rue89, Courrier International et l'Agence France-Presse. À son retour à Québec, elle a travaillé au journal Le Soleil et pige aujourd'hui pour divers magazines. On peut aussi la surprendre en train de nous servir un café, car elle est aussi barista!»