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Être ami avec ses collègues et son patron est-ce une bonne idée ?

J’ai toujours entretenu des relations amicales avec mes collègues et mes employeurs. Parfois, ça devenait carrément de l’amitié. Jusqu’où cette amitié peut aller dans un contexte de travail? Y a-t-il une limite à ne pas franchir?

Les habitudes de travail au 21e siècle ont changé. Désormais, nous passons la majorité de notre temps au boulot, donc nous ressentons le besoin de créer des liens professionnels et émotifs plus forts avec nos collègues, car ils ont souvent une part centrale dans nos vies. Bonne nouvelle, un rapport paru l’automne dernier par Globoforce révèle que l’amitié au travail augmente notre implication au sein de l’entreprise. En effet, ceux qui ont beaucoup d’amis au travail seraient trois fois plus attachés à l’entreprise, même qu’ils feraient deux fois plus confiance au patronat.

On constate également que la reconnaissance par les pairs est une forme de valorisation importante pour un employé, parfois même plus que celle venant du patron. Donc, plus on a d’amis au travail, plus on a de chances d’être félicités. Le sondage met aussi en lumière le besoin d’être soutenus lors des moments difficiles, autant sur le plan professionnel que personnel. Il est bon de pouvoir compter sur des amis pour nous offrir leur soutien.

Jusqu’à maintenant, tout va bien! L’amitié entre collègues est, semble-t-il, souhaitable. Pourtant, pendant longtemps et encore aujourd’hui, certains patrons pensaient qu’il peut être malsain d’embaucher des employés qui sont amis entre eux, car cela pourrait nuire aux objectifs de l’organisation ou entraîner une baisse de leur efficacité, etc. Selon Carole Lamoureux, professeure au département d'organisation et ressources humaines à l’UQÀM, cette perception a beaucoup évolué durant la dernière décennie. Lors d’une récente intervention dans une entreprise, une gestionnaire lui a confirmé qu’elle n’a plus de soucis depuis qu’elle a engagé «une gang de chums». «Il n’y a plus de problèmes de roulement, les gens sont motivés, ils s’aident et parfois ils partent plus tard sans charger de temps supplémentaire pour aider quelqu’un qui a besoin», relate-t-elle.

Relation amicale VS amitié

Cependant, la situation est différente entre patrons et employés. Dans ce cas, l’amitié est «beaucoup moins souhaitable selon plusieurs études et recherches parce que dans une relation d’amitié, [l’employé] peut être ostracisé par le restant du groupe. Les autres pourront trouver qu’elle a des avantages qu’eux n’ont pas ou encore qu’elle a des passe-droits. Ça place tout le monde dans une situation bien fragile.» En contrepartie, il est souhaitable qu’il y ait une relation de chaleur et de respect entre le patron et ses employés. «Le patron doit savoir quelles sont les aspirations, les besoins, les intérêts, les motivations et les démotivations des gens qui travaillent avec lui. Pour cela, il faut avoir une relation amicale. Ça ne veut pas dire d’aller prendre un 5 à 7 à tous les soirs avec le monde ou partir en partie de pêche!»

Marie-Hélène Gilbert, professeure au département de management à l’Université Laval, pense que le gestionnaire doit garder une certaine distance avec l’employé pour être en mesure d’intervenir. «Pour qu’un employé se sente bien au travail et qu’il se développe de façon saine, trois besoins psychologiques fondamentaux doivent être satisfaits: le besoin de se sentir autonome, de se sentir compétent et de se sentir affilié au plan social, donc de se sentir entouré, de faire partie de la gang et de sentir soutenu. Ce besoin correspond au fait d’entretenir une bonne relation avec ses collègues et son patron, mais pas nécessairement d’être ami avec lui», souligne-t-elle.

Des relations virtuelles plus chaleureuses

De plus en plus de gens travaillent à distance pour des raisons pratiques ou bien parce que leur employeur le leur demande. Actuellement, la préoccupation est de savoir comment développer des relations socio-affectives avec le groupe de travail virtuel. «Les logiciels tels que Skype et FaceTime peuvent aider, mais ce n’est pas comme s’asseoir avec quelqu’un», pense Carole Lamoureux. C’est pourquoi il est nécessaire d’organiser des rencontres physiques à l’occasion entre les gens afin de favoriser une certaine proximité. «On se rend compte qu’il y a des effets pervers qu’on n’avait pas anticipés sur le plan de la création de liens solides, de l’entraide, de l’engagement de l’entreprise, de la compréhension de la mission de l’entreprise», poursuit-elle. Mme Gilbert abonde dans le même sens: «Si on fait du télétravail et que tout le monde est chacun chez soi, ça peut être très intéressant sur le plan de la conciliation, mais de l’autre côté, il y a beaucoup moins de synergie d’équipe. Plus on a un réseau social, plus on a des ressources, donc moins on se sent seuls.»


Marie-Anne Dayé - Blogueuse Hotelleriejobs

«Marie-Anne Dayé est journaliste indépendante depuis près de deux ans. Lors d'un séjour en France, elle a écrit pour des médias tels que Rue89, Courrier International et l'Agence France-Presse. À son retour à Québec, elle a travaillé au journal Le Soleil et pige aujourd'hui pour divers magazines. On peut aussi la surprendre en train de nous servir un café, car elle est aussi barista!»